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L'ECOEUREMENT littérature bd politique cinéma art
13 septembre 2007

Qu'est-ce qu'un dispositif ?

Qu_est_qu_un_dispositifde Giorgio Agamben

aux éditions Payot, 2007

(Rivages poche / Petite Bibliothèque)

Ce très bref ouvrage - cinquante pages seulement -, en repensant à son tour l'Oikonomia chrétienne, en dévoile la dernière actualité, les derniers développements, en tant que dispositif, et complète assez bien le travail de Marie-José Mondzain, même s'il ne concentre pas son analyse sur "l'image" en particulier. Il s'agit bien plus de penser la globalité du réseau qui relie les divers éléments qui gouvernent nos vies dans le capitalisme avancé, et d'en montrer l'aspect religieux, la sacralité séparante. Partant aussi des remarques effectuées par Michel Foucault sur le panoptique - et plus généralement sur ce qu'il appelait la positivité - Agamben insiste sur son élargissement actuel, qui transforme l'espace-monde en une gigantesque prison où la vie est toujours plus séparée d'elle-même. Le dispositif s'en empare et sépare, il sacralise plus parfaitement que les religions qui l'ont précédé. Il faut bien admettre en effet que, si la profanation (c'est-à-dire la restitution à la sphère profane de ce qui avait d'abord été séparé par le rite religieux) était toujours encore possible dans le "gouvernement" chrétien, par exemple, celle-ci s'avère aujourd'hui beaucoup plus difficile à effectuer, malgré l'impérieuse nécessité de le faire. En ce sens, il n'est pas difficile de saisir que le capitalisme est un ordre religieux plus abouti que celui de l'église. Aussi pourrait-on reprocher à Agamben de ne faire paradoxalement qu'un voeux pieux en appelant à trouver les nouvelles modalités qui rendraient de nouveau la profanation possible et opérante, puisqu'il est patent qu'il ne donne guère de pistes qui nous permettraient d'aller dans ce sens. Mais c'est qu'il faut d'abord éviter certains écueils où beaucoup s'engagent et courent à leur perte : la destruction ou la bonne utilisation du dispositif (celle du portable ou des divers médias par exemple). Il apparait de plus que cet ouvrage semble introduire seulement un travail plus imposant qui devrait paraître d'ici quelques temps. Quoiqu'il en soit, la profanation n'est pas l'affaire d'un seul Homme, et il nous appartient à tous d'en chercher les nouvelles modalités.

Léolo

Extraits du livre : 1 - Qui se laisse prendre dans le dispositif du "téléphone portable", et quelque soit l'intensité du désir qui l'y a poussé, n'acquiert pas une nouvelle subjectivité, mais seulement un nouveau numéro au moyen duquel il pourra, éventuellement, être contrôlé ; le spectateur qui passe sa soirée devant la télévision ne reçoit en échange de sa désubjectivation que le masque frustrant du zappeur, ou son inclusion dans un indice d'audience.

2 - Alors que les normes européennes imposent à tous les citoyens ces dispositifs biométriques qui développent et perfectionnent les technologies anthropométriques (depuis les empreintes digitales jusqu'aux photographies signalétiques) qui avaient été inventés au XIXième siècle pour identifier les criminels récidivistes, la surveillance vidéo transforme les espaces publics de nos cités en intérieurs d'immenses prisons. Aux yeux de l'autorité (et peut-être a-t-elle raison), rien ne ressemble autant à un terroriste qu'un homme ordinaire.

Giorgio Agamben

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