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L'ECOEUREMENT littérature bd politique cinéma art
31 mai 2007

Elle écrasa sa cigarette, pensive, sans nervosité

Elle écrasa sa cigarette, pensive, sans nervosité mais le regard embelli du mascara des regrets, de ces regrets infaillibles qui impriment des rides crues sur le creuset du temps sans qu'on s'en aperçoive : anatomie du charme incendiaire gréé au corps d'Agnès, sans aucun compte à rendre. L'irrévérence de ses tournures agrippait l'espace et l'inondait des sueurs électriques rajiformées (6) sur les grèves de son inconscient. Même muette, l'armature de sa langue torpillait encore le frimas des confidences vaines où les Hommes se désertent, emportés par des saisons d'habitudes intériorisées. Je l'observais sans démâter. Le petun finissait de se consumer dans le cendrier, laissant s'évanouir la dernière écume filandreuse de son embrasement. La Moniale devenait furtive, et l'heure approchait qui allait rompre la séance. La vieille madame Derouet, une autre de mes patientes qui avait la particularité maladive de se présenter toujours avec un quart d'heure d'avance au moins, devait d'ores et déjà se crisper d'impatience devant ma porte. Il était moins une. Agnès enfila sa veste noire-corbine en s'extirpant de la méridienne où elle s'étendait lors de chaque séance telle une gosse détachée dans le sourire nacré des somnolences pudiques. Une capuche assez large végétait sur son dos. Elle ajusta, d'un geste et tête baissée, la bandoulière de son sac, et m'adressa un sourire - c'était un sourire de quai de gare, de main lâché de valise oubliée, un sourire du coin de l'oeil, un sourire de moniale évidemment peut-être.

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