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L'ECOEUREMENT littérature bd politique cinéma art
31 mai 2007

La Moniale et le Cap-Codais raffolaient de cette

La Moniale et le Cap-Codais raffolaient de cette langue démodée. Ils entamaient toujours ainsi leurs conversations, dans un style vouvoyant qui avait le don d'irriter parfois un client passager, et qu'ils étiraient certains jours jusqu'à l'épuisement, en tout cas du moins jusqu'à l'heure venue de la fermeture. Le baume au coeur était en réalité un Bowmore, un scotch assez sablonneux, dont les saveurs diffusaient gracieusement au palais l'amertume ancestrale des tourbières lagganiennes(24), et le diamant chargé d'en redoubler l'audace avait autrement dit tout du parfait glaçon cubique. Mais Agnès et mon capitaine aimaient parler d'alcool avec cette espèce de langage secret, tantôt riche ou désuet, plus rarement affété ou poseur, icelui langage ils fabriquaient jour après jour, non cependant sans rendre immuables les expressions les plus affinées. Le Cap-Codais n'avait eu de plus aucun mal à deviner ce que la Moniale souhaitait siroter. Elle avait ses habitudes éthyliques, et n'en variait qu'avec exception. Il déposa les dix centilitres de « tourbeux » frappé devant elle, près du cendrier sur lequel en lettres d'or sur fond noir on discernait mon nom : Au Grand Godet d'Engels.

    - Et du baume au coeur pour bénir la nef amène de ma damoiselle...

    - Ainsi soit-il, poursuivit-elle, rieuse.

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