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L'ECOEUREMENT littérature bd politique cinéma art
15 septembre 2007

Si la mode est un art, affecté à l’adolescence en

Si la mode est un art, affecté à l’adolescence en tant qu’archétype, alors on peut dire que cet art est mortel. Qu’il est avant tout une esthétique de la dépossession, qui se comprend, - comme chaque phénomène -, en le prenant par ses extrêmes. Cette leçon retenue de Lévi-Strauss, nous pouvons mieux voir que, si le kamikaze n’a d’autre choix que de se désintégrer pour détruire le système qu’il honni : «Je n'avais pas à faire ça. Vous aviez cent milliards de chances et de moyens d'empêcher ce qui s'est produit aujourd'hui... Vous m'avez poussé dans un coin en ne me laissant qu'une seule option... Maintenant vous avez du sang sur les mains qui ne s'en ira jamais» hurle Cho-Seung-hui dans une vidéo, alors le mannequin est un modèle d’intégration maximal de toutes les normes. Ce corps « intégré », présenté comme un idéal à des masses adolescentes, n’a pas d’autres issues que le sacrifice. La plupart ne vont pas jusqu’à ce point de « perfection » (le trait commun des mannequins décédés était le perfectionnisme), elles restent en deçà cherchant ensuite à se réapproprier les traits de l’adolescence, notamment la créativité. Il n’empêche qu’il faut maintenant passer par cette dépossession, qui fait de l’homme un cobaye pour Loft ou Star Académie, pour exister dans le monde du spectacle. En déliant du labeur la starification, on projette un rêve que l’art moderne avait déjà anticipé par le Ready-Made de Marcel Duchamp. Cet objet industriel élevé au rang d’œuvre d’art, malgré son extraction iconoclaste du monde sériel, représentait déjà cet univers du « déjà fait ». Le mannequin poursuit lui le fantasme du « déjà là », comme si une ordination divine du marché suffisait à l’élire. Il faudrait faire la recension de tous les gestes esthétiques prélevés au registre adolescent, pour être ensuite captés par le monde marchand post-politique. L’un des cas les plus évidents se trouve dans L’art comme expérience de John Dewey, véritable bréviaire venu du pragmatisme anglo-saxon, et qui servit à l’école de « l’acte pour l’art », aux initiateurs du happening, de l’œuvre passée dans la vie comme performance. C’est à partir de ce renversement que l’adolescent s’est vu rapter ses formes de modélisations pour venir alimenter la machine à produire. Pour montrer l’ampleur du danger que fait courir une société qui industrialise les corps adolescents, il n’est qu’à songer à la pornographie de masse où les teens sont représentés dans des passages à l’acte incestueux, joués « pour de vrai », ils deviendront un jour réel tant la massification crée une impossibilité de reconnaissance ; ce body art porno est déjà la levée effective du tabou qui fonde toute société : celui de l’inceste(5). C’est un pacte faustien que la société a passé avec elle-même, le culte juventiste ne peut que s’alimenter du déni de réalité, d’un malaise dans la filiation, par une abréaction permanente du temps.

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